Jean-François FOURCADIER
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Réalisation d'un modulateur numérique QPSK

(avec des composants de fond de tiroir)

Introduction

La modulation QPSK, ou modulation à quatre états de phase, a été largement utilisée depuis une trentaine d'années en transmission de données professionnelle : modems V26 à 2400 bits/s, faisceaux hertziens à faible capacité, systèmes radio, voie de retour sur les réseaux de télévision par câble, etc... C'est aujourd'hui le type de modulation retenu par DVB pour la transmission de la télévision numérique par satellite. La modulation QPSK présente de grandes qualités lorsque le support de transmission est bruité. Elle conduit à une bonne efficacité spectrale avec un rendement théorique maximum de 2 bits/s par Hertz de bande passante. Son principe a été décrit dans de nombreux ouvrages. Sur l'Internet, le lecteur intéressé pourra par exemple consulter un panorama des différentes familles de modulations numériques sur le site de Spread Spectrum Scene, (voir le papier "Digital modulations" qui est un exposé simplifié des différentes modulations numériques), ou encore sur le site de Maxim, la note d'application "QPSK demystified" qui donne des détails sur ce type de modulation.

Il existe aujourd'hui sur le marché des circuits intégrés spécialisés, tels que le AD8346 de Analog Devices ou bien le STQ-1016 de Sirenza Microdevices, qui réalisent directement la fonction de modulation QPSK. Il suffit d'introduire le signal de porteuse et les données pour obtenir en sortie un signal modulé QPSK.

La réalisation présentée ci-dessous effectue la modulation de manière plus traditionnelle, au moyen de composants courants, voire de récupération. La porteuse a ici une fréquence de 65 MHz et le débit binaire transmis est soit de 271 kbit/s soit de 2048 kbit/s suivant l'application envisagée et le choix des filtres dans le montage.

Synoptique d'un modulateur QPSK

Le synoptique ci-dessous se trouve dans tous les ouvrages décrivant la modulation à quatre états de phase. La modulation numérique est appliquée sur deux entrées marquées I et Q. Deux mélangeurs équilibrés reçoivent la porteuse provenant d'un oscillateur, une entrée étant déphasée de 90° par rapport à l'autre. Enfin les deux sorties des mélangeurs sont additionnées pour fournir le signal de sortie.

Tout ceci peut paraître compliqué, mais les choses deviennent beaucoup plus simples lorsque l'on sait qu'un déphaseur peut se réaliser au moyen d'une simple résistance et d'un condensateur, et que l'additionneur de sortie peut se résumer à 2 résistances.....

Le filtre de Nyquist

Afin de limiter la largeur de bande occupée à l'émission, nous filtrerons le signal numérique modulant issu des entrées I et Q avant de l'appliquer aux modulateurs équilibrés. En effet, en l'absence de filtrage, soit au niveau des voies I et Q, soit après modulation, le spectre est incompatible avec une transmission par voie hertzienne.

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le spectre en l'absence de filtrage

Deux filtres ont été étudiés, pour des débits respectivement de 271 kbit/s et 2048 kbit/s. Le filtre placé sur chaque voie I et Q d'émission doit avoir une bande passante de 67, 7 kHz et 512 kHz à - 3dB respectivement. La distorsion de temps de propagation de groupe dans la bande doit être maîtrisée et nous utiliserons donc une structure de Bessel. L'étude est réalisée grâce au logiciel gratuit Filter Free, téléchargeable sur l'Internet.

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filtre 271 kbit/s
filtre 2048 kbit/s

La phase de mise au point

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A gauche la plaque d'essai cuivrée qui a servi à la mise au point.

A droite, un premier montage raté ! Il faisait appel à un filtre de Bessel du cinquième ordre dans les voies I et Q (voir sur la photographie les deux paires de bobinages). A l'usage, il est apparu bien difficile de réaliser avec des composants ordinaires deux filtres parfaitement appairés. La différence de phase entre les deux voies dépassait 10° à 67 kHz, ce qui conduisait à un fonctionnement médiocre (interférences entre voies, mauvaise réjection de la bande latérale indésirable lors du réglage).

Autre essai non concluant: l'utilisation de circuits intégrés MC1488 pour effectuer la commutation des diodes des mélangeurs équilibrés. Ce circuit très répandu est utilisé dans les ordinateurs pour effectuer la transition TTL / RS232 pour le port série. L'idée paraîssait séduisante: une entrée TTL, une sortie symétrique de grande amplitude! Hélas, aux essais, les temps de basculement ne se sont pas révélés strictement identiques dans les deux sens. Le biais ainsi introduit ne permettait pas une isolation suffisante entre les voies I et Q.

La grande leçon des nombreux essais qui ont été conduits est qu'il est fondamental de conserver une symétrie parfaite entre les voies de traitement I et Q. Tout écart se traduit par une baisse rapide des performances. Comme on le verra, cette règle n'est pas incompatible avec l'utilisation de composants ordinaires, sous réserve de prendre quelques précautions simples.

 

Réalisation

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- le schéma

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L'oscillateur à 65 MHz est récupéré sur une vieille carte d'ordinateur. Un filtre passe-bas du troisième ordre Tchebychef, calculé avec Filter Free, élimine les harmoniques indésirables. Le transistor BF199 Q1 monté en collecteur commun délivre donc un signal sinusoïdal à 65 MHz, sous une faible impédance.

Le potentiomètre de 100 ohms permet d'équilibrer les amplitudes sur les deux voies de porteuses. Au lieu de déphaser une des deux porteuses de 90°, il est plus aisé d'en déphaser une de + 45° et l'autre de - 45°. C'est là le rôle des condensateurs parallèles de 47 pF et 100 pF (retard de phase) et série de 27 pF (avance de phase). Le condensateur ajustable de 100 pF permet d'ajuster le déphasage entre les deux voies de porteuses à 90°, très précisément.

Les voies de modulation I et Q sont identiques. Après une adaptation d'impédance composée de la paire de transistors classe B, Q2 et Q3 (resp Q4 et Q5) et de la résistance de 47 ohms, le signal modulant traverse le filtre de Nyquist dont la fréquence de coupure est de 67,7 kHz à -3dB. Une cellule d'affaiblissement améliore la tenue des impédances sur les accès avant que le signal n'attaque le modulateur équilibré type SRA-1.

Le push-pull composé des transistors Q6 et Q7 fournit une demi-tension d'alimentation, soit 2,5 V, aux modulateurs équilibrés de manière à permettre une commutation des diodes symétrique, au niveau de ces modulateurs.

En sortie, la sommation s'effectue au moyen des résistances de 100 ohms et 68 ohms. Ces valeurs fournissent une adaptation correcte des impédances sur les trois accès.

Enfin, pour améliorer la réjection du signal de porteuse en sortie, phénomène dû aux fuites internes aux modulateurs équilibrés, il s'est révélé nécessaire d'effectuer un neutrodynage. Ce dernier consiste à prélever en amont une très faible quantité de porteuse avec l'amplitude et la phase correcte, et de l'ajouter en sortie. Le résultat est spectaculaire: une amélioration du niveau de fuites de 20 ou 30 dB !

Téléchargez le dessin du circuit imprimé au format Ares, QPSK.lyt (9 ko zippé)

Lors de la réalisation, on veillera à observer une symétrie parfaite entre les voies de traitement I et Q. Le niveau de performance en dépend ! Les composants, de qualité ordinaire, seront appairés deux à deux, entre homologues, au moyen d'un ohmètre pour les résistances, d'un capacimètre pour les condensateurs. Les inductances des deux filtres de Nyquist passe-bas sont rendues ajustables grâce à un noyau en ferrite.

Les réglages

Nous nous sommes dotés de deux éléments de réglages pour ajuster les amplitude et phase des deux porteuses appliquées aux modulateurs équilibrés. Mais comment être certains que les amplitudes sont bien égales et que les deux porteuses sont déphasées de 90° très précisément ? La performance du montage dépend de la qualité de ces réglages !

La réponse à cette épineuse question est suggérée par Minicircuits dans une de ses notes d'application: Si nous appliquons sur les entrées de modulation I et Q deux signaux numériques périodiques déphasés de 90°, le spectre du signal de sortie se réduira à une seule raie latérale, de fréquence inférieure ou supérieure à la porteuse, suivant le sens du retard.

Construisons donc rapidement un petit outil de réglage au moyen de trois circuits intégrés. Deux bascules JK montées en compteur synchrone nous garantissent une quadrature parfaite entre les deux signaux modulants à 135 kbit/s.

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Le schéma

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Le circuit imprimé:

Téléchargez le dessin du circuit imprimé au format Ares, quadrat.lyt (5 ko zippé)

Connectons cet outil de réglage:

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A gauche l'alimentation 5 V, au centre notre petit générateur de réglage, à droite notre modulateur QPSK. Un inverseur permet d'inverser les signaux I et Q, et d'observer ainsi alternativement la raie supérieure puis la raie inférieure. On peut juger de cette manière la qualité de l'équilibrage.

 

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vertical: 10 dB/div, horizontal: 20 kHz/div

On visualise au centre de l'écran, la porteuse, à gauche et à droite les deux raies latérales distantes situées à 67 kHz de la porteuse. La raie latérale indésirable est à -50 dB par rapport à celle qui est utile. Le réglage est pointu et les essais en température n'ont pas été réalisés. Ce n'est cependant pas si mal pour un truc amateur !

Le niveau de fuite de porteuse qui peut atteindre au départ -20dBc s'améliore très nettement au moyen du neutrodynage. En tâtonnant - choix de la prise et valeur de l'élément réactif série (au cas présent un condensateur de 2 pF placé au point "X") - on atteint assez facilement un niveau de fuite inférieur à -40dBc, voire -50 dBc.

Fonctionnement

Connectons maintenant notre générateur pseudo-aléatoire sur les entrées I et Q, et observons à l'analyseur le spectre du signal produit:

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vertical: 10 dB/div, horizontal: 200 kHz/div

Le spectre est en tout point conforme aux attentes. On observe bien, de part et d'autre de la fréquence centrale, les zéros pour chaque multiple de 271 / 2 = 135 kHz. Le spectre s'étale un peu par rapport à celui d'émissions professionnelles: ceci est la conséquence d'un choix de filtre de Nyquist simple, du troisième ordre, dans les voies I et Q et à l'absence de filtrage ultérieur du signal RF modulé.

Une véritable évaluation du fonctionnement nécessite l'utilisation d'un démodulateur QPSK: ces essais seront conduits ultérieurement. Le niveau de qualité de l'oscillateur très économique que nous utilisons sera évalué.

Conclusion

Ces essais montrent qu'il est tout à fait possible au niveau amateur de réaliser un modulateur numérique au moyen de quelques composants courants et peu coûteux. Un analyseur de spectre n'est nécessaire que pendant la courte phase de réglage. Avec un peu de soin dans la réalisation, le niveau de performance atteint est tout à fait honorable.

On dispose alors du coeur d'un émetteur de signaux numériques. La porteuse à 65 MHz qui est modulée peut ensuite être facilement transposée de manière traditionnelle à la fréquence de son choix, au moyen de simples mélangeurs et fitres.

allumons nos fers à souder !

 

 

 

73 de Jean-François FOURCADIER, F4DAY

 

 

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